Souvenirs de coopération 1987-1991

 

 

Je suis parti en coopération civile à Franceville (Gabon) une première fois de septembre 1987 à juillet 1991. J'étais enseignant-chercheur à l'Ecole Polytechnique de Masuku, c'est à dire l'école d'ingénieurs du Gabon. Ces quelques lignes, par des exemples choisis, ont pour but de décrire le milieu coopérant français ainsi que la vie universitaire de cette époque.

 

Pour replacer le contexte, l'enseignement dans cette école était assuré en grande partie par des coopérants français, lesquels pouvaient être titulaires de l'enseignement supérieur français (mon cas) ou bien contractuels. S'ajoutaient des coopérants canadiens ainsi que quelques enseignants recrutés locaux africains (du Mali, du Bénin, etc). Très peu d'enseignants gabonais, le boulot étant particulièrement mal payé par rapport à l'industrie.

L'administration de l'Ecole était assurée par des Gabonais, à l'exception du directeur qui était français mais associé à un directeur gabonais. Toutes les secrétaires étaient gabonaises.

 

Cette école venait de sortir de terre et en était à sa deuxième année scolaire quand je suis arrivé. Elle prenait la suite de l'Ecole Nationale Supérieure d'Ingénieurs de Libreville qui avait eu une bonne réputation. Mais les politiciens avaient choisi de transférer cette école à Franceville, désert technologique, uniquement parce que c'était la ville natale du président Bongo !

 

L'équipe d'une cinquantaine de coopérants était très jalousée par les français habitants à Franceville depuis des lustres. Eux étaient sur le départ : le prix du pétrole avait chuté. Plus d'argent au Gabon. Ils avaient obtenu des emplois de chefs de chantiers ou tenaient des commerces dans le technique, après avoir pour beaucoup vécu la fin de la période coloniale ou trempé dans des affaires louches avec les chefs d'états africains mis en place par la France. Leur comportement avec leurs employés africains était proche de l'esclavagisme. Ils ne se gênaient pas pour les rabrouer vertement à chaque occasion et à les infantiliser. Mais la crise était là. Ils devaient rentrer en France. Eux qui auparavant étaient les rois de Franceville, se comportant comme des colons envers les Africains qu'ils méprisaient, allaient se retrouver dans un pays qu'ils ne connaissaient plus et sans travail. Vues leurs qualifications, ils n'étaient d'ailleurs pas prêt d'en trouver.

Nous, les coopérants, arrivions avec des idées nettement plus humaines et des situations financières intéressantes. Ils nous détestaient.

 

 

Bien sûr, tout ce que je raconte ci-dessous est entièrement véridique. J'ai juste changé les noms des personnes pour ne pas leur nuire.